( Paris sous un soleil d'hiver. )
Ange.
Ne mens pas, le rouge de tes bras parle a ta place. As-tu réellement cru que ces cicatrices sanguinolentes allaient t'aider à déployer tes ailes ? Ce n'est pas en déchirant les voiles du bateau que tu l'empecheras de sombrer. Et te voila maintenant, les deux pieds toujours sur Terre et tes souffrances toujours présentes, collant désespérément ton avant bras contre ta taille et masquant par un sourire le carnage de ton champ de bataille intérieur.
Ange, je ne connait pas ton passé, je ne sais pas quel parasite vit en toi de la moelle de ton ame et de ta vivacité. Je n'ai rien à répondre à ton immense désespoir, non, je n'ai meme pas de quoi soulager tes cicatrices intérieures, celles qui saignent le plus. Je ne connait pas le baume qui apaiserait ton ame en lambeaux, ni l'aiguille pour recoudre les haillons de ton coeur. Mes paroles qui se voudraient réconfortantes ne peuvent rien contre le mur de ton douloureux mutisme. Je n'ai qu'une main à te proposer, une main et un message, Ange : si la malle de tes douleurs est trop lourde à tirer, souviens-toi que nos bras sont la pour soulager les tiens. Si tu es seule à tenir le gouvernail de ta vie, souviens toi que nous pouvons faire en sorte que tu aies du vent dans tes voiles. Souviens-t'en, je t'en supplie, la prochaine fois que tu voudras déployer tes ailes. Car je crains de voir venir le jour ou, exténuée par tes défaites dans cette bataille infinie que tu menes, tu lacheras le gouvernail et laissera ton bateau dériver lentement, jusqu'a l'endroit ou la Terre s'arrete.